Loin de moi le désir de commenter un fait d'actualité* à la manière des encadrés qu'on trouve parfois dans la presse sur le mode "l'avis du psy", comme si
1) les psys avaient un avis sur tout, 2) cet avis était forcément pertinent.
C'est au contraire d'autres commentaires sur l'affaire de la viande hachée, des créations graphiques humoristiques, qui ont attiré mon attention sur la question.
Celle-ci, à gauche, puis un dessin vu sur Internet, signé de Deligne. On y voit deux hommes, l'un (homme de la ville) demande à l'autre (homme de la campagne).
- Ils sont de quelle race vos boeufs ?
L'autre, derrière lequel on devine un enclos où sont parqué des chevaux :
- Ce sont des lasagnes.
La stupeur passée, on a l'impression que la supercherie donne à rire. Et ce rire est possible car contrairement à d'autres crises alimentaires où le consommateur était victime d'empoisonnement ou exposé à des dangers sanitaires, ici ce n'est pas le cas. C'est juste une viande pour une autre.
Mais quelque chose reste difficile à digérer. Car nous ne sommes pas qu'estomac et intestins (endoderme). Nous sommes aussi émotion, réflexion, mise en rapport, relativisation, intelligence (ectoderme).
Une viande à la place d'une autre, c'est un être à la place d'un autre et aussi, selon le titre de la géniale pièce de Tardieu, "un Mot pour un autre" (le signifiant se balade).
On peut se demander ce qui leur a pris à ces "professionnels" de l'alimentaire. Ils auraient pu, tout aussi bien, promouvoir des lasagnes à la viande hachée de cheval. La viande de cheval a bonne réputation, elle est plus maigre que celle du boeuf (il n'y a pas si longtemps on en donnait fréquemment aux enfants, je parle d'un temps où les boucheries chevalines existaient), et ce simple argument aurait sûrement suffit à les vendre, et au même prix. Mais ils n'ont pas osé. Ils ont donc pensé que le mensonge était préférable, que le bénéfice était général.
C'est la dynamique du secret de famille. Un jour, une ou des personnes décident de dissimuler quelque chose, pour le soi-disant bien de tous. C'est un morceau d'histoire, ou une origine différente, à coup sûr quelque chose qui paraît inavouable. Parfois cela entraîne effectivement "un mot pour un autre", un "nom du père" à la place d'un autre.
Et chaque fois, un jour où l'autre, la vérité s'échappe du cheval de Troie du mensonge. C'est alors l'heure de passer à table.
* Il s'agit du scandale sanitaire de 2013 qui portait sur une fraude : de la viande de cheval était substituée à la viande de boeuf par la ruse d'une modification d'étiquetage, certains produits, notamment des lasagnes, comportant carrément 100% de viande chevaline.
1) les psys avaient un avis sur tout, 2) cet avis était forcément pertinent.
Celle-ci, à gauche, puis un dessin vu sur Internet, signé de Deligne. On y voit deux hommes, l'un (homme de la ville) demande à l'autre (homme de la campagne).
- Ils sont de quelle race vos boeufs ?
L'autre, derrière lequel on devine un enclos où sont parqué des chevaux :
- Ce sont des lasagnes.
La stupeur passée, on a l'impression que la supercherie donne à rire. Et ce rire est possible car contrairement à d'autres crises alimentaires où le consommateur était victime d'empoisonnement ou exposé à des dangers sanitaires, ici ce n'est pas le cas. C'est juste une viande pour une autre.
Mais quelque chose reste difficile à digérer. Car nous ne sommes pas qu'estomac et intestins (endoderme). Nous sommes aussi émotion, réflexion, mise en rapport, relativisation, intelligence (ectoderme).
Une viande à la place d'une autre, c'est un être à la place d'un autre et aussi, selon le titre de la géniale pièce de Tardieu, "un Mot pour un autre" (le signifiant se balade).
On peut se demander ce qui leur a pris à ces "professionnels" de l'alimentaire. Ils auraient pu, tout aussi bien, promouvoir des lasagnes à la viande hachée de cheval. La viande de cheval a bonne réputation, elle est plus maigre que celle du boeuf (il n'y a pas si longtemps on en donnait fréquemment aux enfants, je parle d'un temps où les boucheries chevalines existaient), et ce simple argument aurait sûrement suffit à les vendre, et au même prix. Mais ils n'ont pas osé. Ils ont donc pensé que le mensonge était préférable, que le bénéfice était général.
C'est la dynamique du secret de famille. Un jour, une ou des personnes décident de dissimuler quelque chose, pour le soi-disant bien de tous. C'est un morceau d'histoire, ou une origine différente, à coup sûr quelque chose qui paraît inavouable. Parfois cela entraîne effectivement "un mot pour un autre", un "nom du père" à la place d'un autre.
Et chaque fois, un jour où l'autre, la vérité s'échappe du cheval de Troie du mensonge. C'est alors l'heure de passer à table.
* Il s'agit du scandale sanitaire de 2013 qui portait sur une fraude : de la viande de cheval était substituée à la viande de boeuf par la ruse d'une modification d'étiquetage, certains produits, notamment des lasagnes, comportant carrément 100% de viande chevaline.
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